• Où la lumière s’effondre  de Guillame Sire  (Éditions Plon) ; 240 pages

    Comme un manque …

    Lecture numérique !

    Merci aux éditions Plon et à Netgalley qui m’ont offert l’opportunité de lire ce roman en avant première.

    Ici il est question d’amitié et d’internet, et des questionnements d’un homme, Robin, qui, lorsque son ami Paul est victime devant lui d’une tentative d’assassinat, doit reprendre le but que celui-ci s’est fixé : détruire internet.

    Internet représente toute un pan de  la vie de Robin: codeur génial, il est l’un de ces geeks au comportement souvent étrange devenus des ultra riches en quelques années. Tout un pan car l’autre pan, c’est Paul qui l’occupe, Paul le meilleur (le seul ?)  ami depuis l’enfance et Paul le collègue de travail. Voilà donc  Robin dans une situation impossible : choisir entre son amitié et sa raison de vivre. Durant les 200 pages du roman, nous allons suivre les doutes, les atermoiements, les aller-retour de Robin, avec toujours ce choix quasi impossible en tête.

    Un choix d’autant plus difficile que  la compréhension des relations humaines n’est pas son point fort, bien au contraire ! Car  en dehors de Paul, dans le fond Robin n’aime pas grand monde ; et sans la technologie d’internet, Robin n’est dans le fond personne, lui qui ne se caractérise lui-même que par sa capacité à coder !

    Avec lui nous allons aussi soulever légèrement le voile sur le microcosme très particulier de ces californiens milliardaires du net, qui se vendent et se revendent à coup de millions de dollars des applis et sites qui n’ont parfois aucune existence réelle. Des milliardaires qui font semblant de s’aimer devant leurs « followers » mais qui se détestent cordialement la plupart du temps.

    Le roman nous aide à nous interroger quant à la réelle importance d’Internet aujourd’hui : une vie sans le net est-elle dorénavant possible ? Que se passerait-il  si du jour au lendemain nous en étions privés ? D’ailleurs, peut-on  réussir à totalement détruire le réseau ?  Et c’est là que le bât blesse d’après moi, car cette réflexion (pourtant vendue dans le 4eme de couv’)  n’est quelque part que superficielle, elle ne va pas assez loin. Certes les éléments purement techniques sont intéressants (détruire les équipements, détruire les accès, supprimer les lignes de code, etc…) mais loin d’être suffisants pour moi à l’alimenter. Certes, on sent bien la volonté de l’auteur de centrer le récit sur les seules conséquences pour son personnage, mais il manque tout de même clairement un véritable élargissement du sujet à l’ensemble de la société.

    Un manque qui a quelque part  gâché mon plaisir, ce qui est franchement dommage, car d’une part le roman est clairement très bien écrit et très agréable à lire, et d’autre part Guillaume Sire a vraiment réussi à nous faire entrer dans la tête de Robin pour nous faire partager sa vision de son entourage et du monde.

    Vous l’avez compris, à l’issue de la lecture je suis partagée ! Si vous recherchez une belle écriture et les récits d’introspection lisez ce roman. Si vous attendez plus de rythme, une histoire plus longue et plus « universelle », laissez le de côté. Mais bien sûr ceci n’est que mon humble avis !   

     

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  • Le grand n’importe quoi de Jean Marcel Erre (éditions Buchet Chastel) ; 304 pages

     

    à pleurer de rire !

    Dans ce dernier roman de JM Erre, il est question d’une minute qui dure des heures, de culturisme, d’amitié, d’adultère, de gobage de poulpe, de poils de lémuriens et de rencontres du ixième type ….

    Vous allez me dire : ça y est, elle a pété un plomb, fondu une durite, on l’a perdue ! Et si vous pensez ça, c’est que… vous n’avez jamais lu un seul des livres de JM Erre… quelle erreur !

    Car comme dans tous ses romans précédents, on retrouve ici le sens de l’absurde et l’humour tellement particulier de l’auteur !  Et c’est encore une fois une réussite !

    L’absurde car l’ensemble de l’histoire l’est, absurde, de la première à la dernière ligne ou presque, mélange improbable de tous les poncifs de la science-fiction : le futur proche, la faille temporelle, les extra-terrestres, des technologies nouvelles qui ont modifié la géopolitique mondiale. Beaucoup d’auteurs auraient pu s’y perdre et nous proposer un gloubi boulga infâme, mais pas JM Erre.  Lui a su conserver une logique et une cohérence totale à ce grand n’importe quoi, qui se découvrent petit à petit au fil d’un récit qui a finalement bien une queue et une tête ; et franchement quand on lit ce livre on se dit que c’est un vrai tour de force, car par moment même moi j’ai eu peur du résultat tellement l’auteur nous embarque loin !

    Mais c’est surtout par son sens de l’humour que JM Erre se différencie. Il possède une capacité à jouer avec les mots pour nous faire pleurer de rire qui n’a je pense que peu d’égal. Il est par exemple capable d’inventer des dizaines d’expressions plus imaginatives les unes que les autres pour décrire un adultère ; avec lui un personnage de culturiste décérébré retrouve de l’intérêt et il fait d’un minus habens veule et terne un héros malgré lui savoureux.  Derrière sa loufoquerie c’est d’une vraie créativité qu’il fait preuve à chaque page pour prendre des mots, les assembler, les mélanger, les tordre pour notre plus grand plaisir !  Et comme à chaque fois ou presque (son Série Z était un brin en dessous de ses autres romans) j’ai franchement ri plus d’une fois (mais maintenant je sais que je ne dois surtout pas lire un JM Erre en dehors de chez moi sous peine d’être regardée bizarrement à chaque éclat de rire !).

    Bref, vous l’avez compris, j’ai adoré et je vous recommande chaudement ce grand n’importe quoi !

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  • Envoyée spéciale   de Jean Echenoz (Editions de Minuit) ; 320 pages

    Drôles d’espions !

    Livre lu en version numérique

    Je tiens vraiment à remercier des « amies de lecture » qui m’ont donné envie de lire ce roman d’un auteur que je ne connaissais absolument pas.  Je les remercie car sans elles je ne me serais certainement pas intéressée à ce livre, et j’aurais raté une perle ! Car ce livre est une perle, que j’ai adorée !

    J’ai adoré le style de l’auteur qui manie avec une facilité incroyable les apartés et digressions plus décalées et loufoques les unes que les autres.

    J’ai adoré cette maîtrise de la langue française, qui démontre qu’on peut être à la fois un très grand écrivain, respectueux des subtilités de notre langue, et un auteur facétieux qui nous fait rire aux éclats.

    J’ai adoré tous ces personnages plus  étonnants, paumés, ahuris, incompétents ou naïfs les uns que les autres (et parfois tout cela à la fois d’ailleurs !). Ces barbouzes ratés qui rêvent du grand coup. Ces militaires sur le retour qui ne comprennent plus rien au monde moderne. Ces « victimes » de leurs combines ratées, des victimes  plus ou moins consentantes « à l’insu de leur plein gré »   (ah le fameux syndrome de Stockholm auquel s’ajoute le moins célèbre syndrome de Lima…).  Ces Nord Coréens paranoïaques et  

    J’ai adoré ces voyages entre Paris, la campagne française profonde (avec ses villages aux noms qui ne peuvent qu’être vrais tellement ils sont improbables) et la Corée du Nord. La description que fait  Jean Echenoz  de ce pays est particulièrement réussie, avec une drôlerie qui cache  (à peine) une vrai critique précise et fouillée des dirigeants de ce pays martyr, et rien que pour cela, pour ces 100 pages là, le livre vaut la peine d’être lu !

     J’ai adoré ce livre d’aventures qui fait d’une joyeuse bande de pieds nickelés  des loosers magnifiques dont on rit en suivant les péripéties absurdes de la première à la dernière page.

    Bref, vous l’aurez compris, j’ai passé un excellent moment de lecture,  et je vous recommande cette Envoyée Spéciale !

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  • La maladroite   de Alexandre Seurat (éditions du Rouergue) ; 121 pages

    La faute au système …

    Ce récit chorale est celui des témoins. Ceux qui ont alerté, mais en vain, ceux qui ont vu mais n’ont rien dit, ceux qui ont « suivi la procédure », ceux qui ont tenté d’agir sans succès.

    La famille, les voisins,  l’école, les travailleurs sociaux, les médecins,  les gendarmes, les instances judiciaires, tous s’expriment dans ce court roman  dur et froid.

    Ils y parlent signalements, procédures, déclarations,  compte rendus,  examens médicaux, avec une distance glaçante, pour mieux faire exploser la réalité, celle de cette petite fille martyrisée dès son tout jeune âge par des parents bourreaux.

    Et puis il y a le grand frère qui entend , qui voit, qui ment lui aussi, parce qu’il ne sait pas quoi faire d’autre, ce garçon dont on se demande comment il va bien pouvoir grandir, devenir adulte, et peut-être avoir sa propre famille un jour, alors qu’il voyait sa petite sœur enfermée dans une cave, ignorée, maltraitée, jusqu’à sa disparition …

    La seule à vraiment parler émotions, sentiments, c’est justement Diana,  qui rit quand on la questionne, qui sourit en répétant les leçons apprises par cœur : je suis tombée, mon frère m’a poussée, je n’ai pas fait attention, je suis maladroite, … Jusqu’à ces quelques mots, prononcés enfin « maman m’a tapée », mais trop tard.

    Aucun misérabilisme dans ce roman, aucun pathos, juste les faits, bruts, directs, sans fioriture. Et une question aussi : qu’aurions-nous fait à la place de cette grand-mère, de cette tante, de ces gendarmes, de ces institutrices, de ces assistantes sociales ?  Aurions nous hurlé, crié, sorti cette petite fille de l’enfer, quitte à briser des murs, quitte à nous mettre en danger, ou bien, comme tant d’autres, aurions nous suivi les procédures, détourné les yeux en pensant que d’autres allaient agir, allaient faire, allaient …

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  •  

    Ressources inhumaines de Fréderic Viguier (éditions Albin Michel) ; 281 pages

    Une déception

     

    Ce roman nous raconte la vie d’une femme salariée dans un hypermarché, qui de simple stagiaire va vite progresser en utilisant tous les moyens à sa disposition à l’exception de ses compétences car (elle l’admet elle-même) elle n’en a aucune, si ce n’est celle d’utiliser les autres à son avantage.

     

    J’attendais beaucoup de ce récit dont le titre et le thème m’ont attirée, mais j’ai très vite été déçue.

     

    Certes le style est fluide et la description de l’absurde et de l’hypocrisie qui règnent dans cette entreprise est plutôt réussie, notamment avec l’utilisation de nombreux mots et expressions à sens multiples ou détournés. De par le choix aussi, de ne jamais nommer le personnage principal du roman qui ne sera que « elle » durant près de 300 pages, et de ne parler des autres personnages que par leur poste dans l’hypermarché (le directeur, le responsable rayon, la responsable ressources humaines, …) ; les rares exceptions concernent ceux qui craquent ou qui font l’objet de mutations sanctions : Gisèle, Gilbert,  …Comme pour redonner aux plus faibles une humanité refusée aux plus durs.

     

    Mais cela ne suffit pas pour rendre le livre intéressant au-delà des premiers chapitres. Car il lui manque une réelle cohérence dans l’évolution du personnage central, cette femme que l’on suit durant quelques semaines quasiment jour après jour suite à son embauche, puis 20 ans après, de nouveau quasi quotidiennement.  On comprend la volonté de l’auteur avec cette coupure, mais cela ne fonctionne pas : le « elle » de 42 ans est bien trop différente du « elle » de 22 ans.  Oui sa volonté peut avoir été émoussée par le temps, et son ambition avec, mais pas autant, pas au point d’avoir disparu. Un fond de méchanceté reste, mais quid de cette capacité à manipuler ses collègues pour avancer, surtout les hommes ?  Et pourquoi sa progression a-t-elle cessé d’un coup ? car si on conserve la logique de la première partie, « elle « aurait dû soit continuer à monter en grade, soit finir elle aussi par devenir victime du système, car dans cet hypermarché il n’y a pas d’autres choix, ce qui rend la situation justement inhumaine !

     

    Bref, de bonnes idées mais une déception au final.

     

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