• Le vide, de Patrick Sénéchal (éditions Fleuve), 737 pages

    Noir, très noir !

     

     

    Ma note : 4,5/5 cool

    Ambiance : frown

    Pour : amateurs de roman noir (déprimés s'abstenir !)

     

    Sans les multiples post de mordus sur le groupe FB « mordus de thriller » (un groupe privé de partage de lectures sur le thème que vous pouvez deviner aisément !), je pense que je serais probablement passée à côté de cet auteur canadien. Et j’aurais eu tort ! Donc mille mercis aux mordus tordus pour tous leurs conseils tellement variés (enfin sauf si on se place du point de vue de ma MAL –dont il faudra vraiment que je vous parle un jour - et de ma liste d’envies, qui grandissent grandissent grandissent… mais ceci est un autre sujet !).

    Ici il est question d’un millionnaire qui devient animateur télé, de flics désabusés mais têtus,  de meurtres sanglants, de suicides étranges, de téléréalité, d’un psychologue au bout du rouleau. Il est surtout question de désespoir, de perte de repère et de sens, de petitesse et de grandeur, de désillusion aussi. Exprimé comme cela, cela donne envie non ?  Et pourtant … Pourtant, l’auteur réussit à nous embarquer avec lui.

     Les personnages sont complexes, même si pas forcément très attachants. On les suit toutefois avec énormément d’intérêt car leur évolution n’est jamais évidente à deviner (leurs actes sont d’ailleurs à plusieurs reprises surprenants). Tous traversent des épreuves terribles et vont y faire face de toutes les manières possibles. Au travers de leurs comportements et réactions, c’est la psychologie humaine que l’auteur passe en revue, sans réellement rendre plus compréhensibles certaines attitudes. Pourquoi ce besoin de se faire humilier en direct par exemple ? Ou d’exhiber ses failles au risque de les voir ensuite se retourner contre vous ?  Pourquoi choisir de voir exhausser ces rêves si petits, si mesquins, si égoïstes,  alors que d’autres, bien plus altruistes ou utiles auraient pu être réalisés ? Sénécal pose donc de vraie questions sur l’humain : sa relation à autrui ; à ce que chacun considère comme de l’intime ou du montrable ; ses priorités ; ses envies profondes, y compris les plus malsaines.  

    Surtout, c’est la structure du livre qui surprend : les chapitres, soigneusement numérotés, ne sont pas présentés dans l’ordre chronologique. Plus surprenante encore est la proposition de l’auteur. Dans le prologue il laisse en effet  le choix au lecteur : lire le récit dans l’ordre proposé ou bien en suivant les chapitres, ce qui nécessite une certaine gymnastique, mais est tout à fait possible. J’ai trouvé cette démarche unique car engageante pour le lecteur, qui avant même de débuter doit faire ce choix, duquel découlera forcément deux manières différentes d’appréhender la lecture, notamment en terme de rythme. Après quelques instants de réflexion, j’ai opté pour la lecture telle que proposée (non chronologique). D’où un rythme avec des cassures, de brusques montées en tension avant des retours arrière ou des temps plus calmes, plus lents. Le récit est prenant, mais peut-être un peu trop long par moment : 50 à 100 pages de moins auraient permis de le rendre encore plus étouffant et « embarquant » (mais ce n’est que mon avis !).

    Avec ce roman, j’ai découvert un auteur au style unique, particulièrement noir aussi, qui au-delà du seul récit propose une vision fondamentalement pessimiste et questionnante de la psyché  humaine. Je le recommande donc vivement … aux lecteurs avertis et non dépressifs !

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  • Prise au piège, de Robert Dugoni (éditions AmazonCrossing), 462 pages

    Un page turner réussi

     Ma note : 4/5 yes

    Ambiance : eek

    Pour : les amateurs de page turner

     

    Lecture numérique !

    Merci aux éditions AmazonCrossing et à Netgalley de m’avoir permis de découvrir ce roman et son auteur.

    Ici il est question de la découverte  du cadavre d’une jeune femme dans un casier de pêche au crabe, à proximité de Seattle. Tracy Crosswhite et ses coéquipiers, membres de l’unité des crimes violents, vont être chargés de l’enquête, qui va commencer par l’identification difficile de la victime. Le thème central est assez classique donc : une inconnue morte violemment, des super flics, une enquête à mener. Mais l’enquête, justement, va progressivement montrer que tout n’est pas aussi classique que cela dans cette histoire, de même que les personnages.

    Des personnages qui tiennent tous la route.  Les femmes sont au centre du récit, avec leurs doutes, leurs fêlures, leur volonté d’avancer aussi, plus forte que tout,  malgré les drames terribles qu’elles ont connus (assassinat d’une sœur, mort tragique de parents, …).  Du côté des protagonistes masculins, plus en retrait, on pourrait reprocher la présence de quelques clichés (le duo de flics inséparables, le supérieur sans carrure, …), mais ils ne nuisent pas à la qualité de l’histoire et rendent certains de ces hommes plutôt attachants (et puis les clichés ne correspondent-ils pas régulièrement à une certaine réalité ?).

    Le point fort du roman c’est surtout son tempo : aucun temps mort, une intrigue qui se dévoile progressivement, avec l’alternance des points de vue de Tracy et d’Andréa, l’un sur le déroulé de l’enquête, l’autre sur ce qui s’est produit avant la découverte du cadavre. L’écriture est très agréable,  efficace, précise ;  elle se met au service du rythme qui va crescendo. Elle nous  permet en même temps de découvrir cette région des Etats Unis, ses villes comme ses paysages, si bien décrits qu’on a le sentiment d’être avec les personnages, dans ce restaurant, ce phare, ce chalet, au bord de l’eau, ou en pleine forêt. Les sensations de chaleur, de froid, d’humidité, de bruit, de calme, sont présentes, affirmées.

    J’ai lu ce livre en 2 jours (malgré ses plus de 400 pages),  embarquée dès les premières pages, et avec une seule envie : arriver au bout, et savoir le pourquoi du comment ! Vous comprendrez donc que je vous le recommande ! A noter : il s’agit du 4eme roman avec ces personnages ; le fait de n’avoir pas lu les précédents ne m’a pas dérangée, je pense d’ailleurs de les procurer afin de mieux faire connaissance avec Tracy Crosswhite.

     

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  • L’émir, de Saïdeh Pakravan (éditions Belfond), 496 pages

    Bien plus qu'une romance !

     

    Ma note perso : 4/5yes

    Ambiance : eek

    Pour : ceux qui sont intéressés par l’histoire récente, par les réflexions sur les religions

     

    Lecture numérique !

    Tout d’abord je tiens à remercier vivement les éditions Belfond et le site Netgalley, qui m’ont offert l’opportunité de découvrir ce très beau roman.

    Ici il est question de la rencontre entre Virginie Page, écrivaine de récit de voyage, et Khaled Hourani, l’émir d’Osmanie, petit Etat arabe aux voisins encombrants : Arabie Saoudite, Koweït, Irak, Iran. D’autant plus encombrants que nous sommes en 1990, à la veille de l’invasion du Koweït par l’Irak. C’est dans ce contexte que va naitre l’histoire d’amour entre ces 2 personnes que tout semble éloigner.

    Quoi ? Une histoire d’amour ? Si vous suivez mes lectures, vous devez vous douter que ce n’est pas tout à fait mon style de lecture ! Et que mon avis risque d’être un peu saignant ….Et effectivement la partie « romantique » du roman m’a semblée un peu too much : ils sont beaux, ils sont riches, ils sont intelligents, tout les sépare mais cela va être le coup de foudre, etc…

    Mais très vite j’ai réussi à laisser cet aspect de côté, car ce livre propose tout autre chose qu’un remake version Cartland de Lawrence d’Arabie ! Il est avant tout et surtout le récit d’une vraie réflexion à 2 voix (occidentale et arabe) sur la religion, sa place dans nos sociétés et dans nos vies ; sur les relations avec les pays musulmans aussi (je ne dis pas arabe car l’Iran n’est pas un pays arabe !).

    C’est en fait un vrai plaidoyer intelligent et argumenté pour la tolérance, le droit de chacun de vivre la religion et sa culture religieuse comme il l’entend à partir du moment où le religieux respecte l’athée autant que l’athée (ou l’agnostique) respecte le religieux. Il met en avant l’hypocrisie, voire la couardise, qui ont prévalu pendant des années et ont laissé monter une lame de fond rétrograde et violente, tant au sein de l’Islam que chez les Chrétiens. L’incohérence des convertis musulmans ultra rigoristes en Europe est par exemple mise en avant, de même que la crainte liée à l’amalgame entre religion et politique dans les plus hauts niveaux de l’administration américaine de l’époque Bush.

    L’auteure ne se contente pas de dénoncer ; elle argumente, étaye, développe ces sujets. La différence entre être musulman et être de culture musulmane ; les limites à ne pas laisser franchir par ceux qui croient (quel que soit le nom de leur dieu) ; les relations entre les femmes et les hommes et leur évolution comparée dans les pays occidentaux et les pays musulmans ; le rapport entre le pouvoir et la religion …. Des sujets délicats et abordés, je le redis, avec beaucoup d’intelligence, et un vrai parti pris ni tiède ni virulent, mais totalement assumé.

    Ce roman, qui balaie presque 15 ans d’une histoire récente qui ont profondément bouleversé nos modes de vie, est une belle découverte, riche, complexe, qui pousse à la réflexion. Je vous le recommande donc vivement !  

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  • Condor, de Caryl Ferey (éditions Folio Policier), 512 pages

    Noir c'est noir ...

     

    Ma note : 4,5/5 cool

    Ambiance : aww

    Pour : les amateurs de polars noirs et de romans sociétaux /politiques

     

    Tout d’abord, merci à Livraddict et aux éditions Folio de m’avoir offert ce roman, le 2eme de Caryl Ferey que je lis.

    Ici il est question de morts qui n’intéressent pas grand monde : des gamins d’un quartier pauvre de Santiago du Chili. Pas grand-monde à part un prêtre au grand cœur, un ancien proche de Salvador Allende survivant des purges de Pinochet, et une jeune femme Mapuche. Ensemble ils vont faire appel à un avocat, fils de grands bourgeois chiliens mis aux bans sa famille, et vont mener  une enquête qui fera ressurgir des sujets datant de la période noire de l’histoire du pays.

    Caryl Ferey va donc utiliser le récit pour brosser le portrait d’un pays qui n’en a pas fini avec son passé récent, un pays déchiré entre très grande richesse et grande pauvreté, et dont les dirigeants ont préféré mettre un voile pas si pudique que ça sur les actes commis durant les années Pinochet. 

    L’histoire est  dure, âpre, sans fards ni fioritures. La galerie des personnages proposés est riche et balaie l’ensemble de la société chilienne : gosses des rues, gosses de riches, minorités exclues du pouvoir, minorité régnant sur la politique et l’économie, anciens ayant vécu le coup d’État de Pinochet dans un camp ou dans l’autre, ayant été torturés ou ayant torturé. Les personnages eux-mêmes sont complexes, et à quelques exceptions, tout en nuance, jamais ni tout blancs, ni tout noirs. Tous portent leur part d’ombre et de violence, retenue ou exprimée.

    Comme dans Zulu, l’auteur nous embarque avec lui dans une intrigue qui monte en puissance, en tension, avec un rythme maitrisé, qui va crescendo. La brutalité des mots, des actes, des gestes est omniprésente, ainsi que le passé du pays, qui sans cesse est rappelé (par petites touches ou flash-back plus longs). Les sentiments naissent, ou se réveillent, lentement d’abord, puis avec de plus en plus de virulence, jusqu’aux affrontements ultimes, qui s’enchainent, se percutent, se chevauchent.

    Encore une fois j’ai adoré l’univers de Caryl Ferey, qui imbrique histoire, social, politique et polar, un univers sans concessions une fois encore, même si le niveau de violence est un peu en deçà de celui présent dans Zulu (enfin, c’est mon ressenti). Encore une fois je vous recommande donc cette lecture ! Quant à moi, 2 autres romans de Ferey m’attendent dans ma MAL, il n’y a plus qu’à…

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  • L’honneur du samouraï, de David Kirk (éditions Albin Michel), 528 pages

     

    Ma note perso :  3/5 ^^

    Ambiance : bad

    Pour : les amateurs de combats, du Japon, des romans historiques

     

    Autant vous le dire de suite : je ne suis pas particulièrement attirée par la culture japonaise, que je connais donc très mal ; ma curiosité naturelle et mon souhait de dépasser (un peu) mes a priori m’ont toutefois donné envie de répondre à la proposition de Babelio  et des Editions Albin Michel : recevoir et lire ce roman. Je tiens d’ailleurs à les en remercier vivement !

    Ici il est question de Musashi Miyamoto, jeune  samouraï du XVIIème siècle, qui au lendemain d’une bataille perdue, va remettre en question certains des préceptes  qui régissent la vie de tout samouraï : fidélité à une école et à un seigneur, suicide sur ordre ou suite à une défaite, … Il va fuir, devenir un ronin, et sera poursuivi durant plusieurs années, jusqu’à un affrontement final au sein même de de la ville de Kyoto, à l’époque capitale du Japon.

    J’avoue avoir eu beaucoup de mal à entrer dans le récit, que j’ai trouvé peu clair, pas assez précis ; à tel point qu’il m’a fallu plusieurs pages pour comprendre qu’il s’agissait du 2eme tome des aventures du samouraï. De mon point de vue, et même si l’auteur s’adresse probablement en priorité à ceux qui ont lui le premier tome, il aurait dû prendre un peu de temps pour replacer l’histoire de son personnage principal. Cela aurait rendu plus  compréhensible son comportement et son cheminement, qui m’a semblé par moment très erratique.

    Je me suis finalement beaucoup plus intéressée aux personnages secondaires, qui m’ont parus bien plus profonds : le métis rejeté et méprisé malgré son implication et sa loyauté ; l’intendant en charge de la ville,  plein de doutes sur l’intérêt de sa mission ; le samouraï arrogant et brutal, trop sûr de lui et de ses capacités ; le vieux maitre d’armes qui a voué sa vie entière à la Voie. Eux permettent d’entrevoir le mode de pensée de ces guerriers, leur manière de de vivre et voir le monde. Un monde fait de règles multiples, à ne jamais remettre en cause.

     Les combats notamment sont extrêmement ritualisés, avec des techniques et des gestes immuables, propres à chaque maison semble-t-il. Ils sont décrits avec énormément de précision par l’auteur (trop peut-être à mon gout), avec leurs différences entre écoles, leur violence extrême aussi (lecteurs sensibles s’abstenir !). Le style de l’auteur est vraiment au service de ces descriptions, et de celles des villages, des paysages, et de la ville de Kyoto, dans lesquels on a le sentiment de se retrouver, tellement elles sont réussies.

    Il y a donc du pour et du contre dans ce livre : d’un côté un personnage principal auquel je n’ai pas réussi à m’attacher, des scènes de combat omniprésentes (que j’ai trouvées répétitives), l’absence aussi de personnages féminins forts et positifs. De l’autre des personnages secondaires qui proposent une vraie profondeur et une vraie diversité,  et une immersion très réussie dans le Japon de l’époque. A vous donc de vous décider, en fonction de ce que vous attendez de votre lecture !

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